Xstrata dirige un nouveau projet : une mine de nickel rachetée à Falconbridge et située dans le Nord de la Nouvelle-Calédonie. De plus en plus cependant, la société fait l'objet d'une surveillance étroite et de nombreuses critiques. Quand ce projet sera achevé la mine sera une des plus grandes mines de nickel au monde. Le territoire, appelé Nouvelle-Calédonie par les Français, est appelé Kanaky par les autochtones, les Kanak. Le pays est connu dans le monde entier pour son très grand nombre d'espèces endémiques (que l'on ne trouve nulle part ailleurs sur Terre) et sa gigantesque barrière de corail, la plus grande au monde, où vivent justement beaucoup de ces espèces uniques.
Depuis longtemps, le projet Koniambo a reçu l'appui de la population Kanak, car Falconbridge offrait au gouvernement provincial du Nord, dirigé par des Kanaks, un intérêt de 51 % dans la mine. Toutefois, les Kanaks ont fait savoir qu'ils ne veulent pas de la mine à n'importe quel prix, et qu'à leurs yeux, le respect de l'environnement et la transparence des opérations constituent une priorité incontournable. Actuellement toutefois, Xstrata transgresse ces deux principes.
La mine ne peut progresser sans infrastructures portuaires importantes. Pour construire un port, la société devra éventrer la barrière de corail, et anihiler des coraux qui ont mis des décennies à se former ; des espèces rares seront peut-être en danger. L'énorme opération de dragage déplacera 9 millions de m3 de sédiments dans le lagon. Les normes internationales optimales exigent qu'un projet de cette envergure exerçant un pareil impact sur l'environnement, recoure à une analyse préalable des données de base sur l'environnement qui sera touché, afin de permettre la surveillance des répercussions et d'atténuer les risques écologiques.
La première erreur qu'a commise Koniambo Nickel SAS (KNS), filiale de Xstrata, a été de permettre à KBR, entreprise internationale d'ingénierie et de construction, qui creusera le canal, de se charger en même temps de la surveillance écologique du récif corallien : il s'agit évidemment d'un conflit d'intérêt, dont les effets peuvent s'avérer dévastateurs pour la barrière de corail.
Selon les spécialistes indépendants qui ont étudié les stations de mesure établies par KBR sur le fond océanique, une seule des quatorze stations de mesure a été installée d'une façon respectant le cahier des charges du projet Koniambo. En outre, les spécialistes notent que la façon dont KBR a monté les stations provoquait elle-même des dégâts inutiles et inadmissibles à l'environnement océanique. Toutes les stations, sauf une, exercent des effets néfastes sur les coraux et les organismes marins. En fait, de nombreux dispositifs de surveillance sont concrètement ancrés dans des colonies de corail vivant, alors qu'ils auraient dû être ancrés sur un substrat non vivant. En plus des dégâts déjà occasionnés au placement anarchique des stations de mesure, l'emplacement non-conforme des stations signifie qu'il n'existe apparemment aucune information de référence concernant cette importante opération de dragage. Un rapport signé par dix-sept organismes écologiques basés en Nouvelle-Calédonie, appuie cette conclusion.
Deuxième erreur de KNS : son manque de transparence au sujet du projet de dragage. À l'aide de la « Charte environnementale KNS – Province Nord », KNS s'est engagée à mettre tous les rapports environnementaux, y compris les données non analysées, à la disposition du grand public, par l'intermédiaire d'associations écologiques. Ceci aurait garanti la transparence de ses opérations. Depuis septembre 2007, les organisations écologiques locales exigent l'accès aux rapports des spécialistes internationaux et nationaux au sujet du plan de surveillance du récif corallien. Toutefois ces rapports qui documentent la non conformité de la construction des stations, laquelle rend inutiles les données modèles, restent secrets. Pendant ce temps, KNS va peut-être, dans les prochaines semaines, faire démarrer son opération de dragage afin de respecter son calendrier.
La troisième erreur de Xstrata a été que son Rapport de developpement durable de 2006 qui doit signaler les incidents environnementaux « considérables », est resté muet sur les dégâts que les stations de mesure KBR avaient occasionnés à l'environnement océanique (classe 3 ou plus).
Enfin, la quatrième erreur de Xstrata a été de congédier le directeur de l'environnement de Koniambo lorsqu'il avait soulevé des objections au sujet de ce problème. En essayant d'occulter ce problème plutôt que d'y faire face, de prendre des mesures pour remédier aux dégâts occasionnés, et de veiller à enregistrer des données océaniques de référence exactes pour le projet de construction du port, Xstrata fait courir des risques inutiles à un écosystème capital. Ainsi, la société risque de voir s'évaporer la confiance et l'appui du peuple Kanak.
Sources:
- Environnement edition number 10, first quarter, 2007;
- Ensemble Pour la Planete (EPLP) “Livre Bleu Vert” http://www.eplp.asso.nc/oldsite/index.html;
- Mireille Harmelin-Vivien and Laurent Wantiez. September 2006. “Assessment of the Setting Up of the Koniambo Project’s Coral Habitat Monitoring Stations”;
- Melanopus. Sept. 2006. “Etat Des Stations Inscrites au Cahier des Charges Suivi environmental marin de Koniambo Nickel SAS”;
- Les Infos. November 9, 2007. “Koniambo: Un Environnement déjà Bafoue?”